La libération de Paris

KIT Pédagogique

Les fiches pédagogiques sont destinées aux enseignant.e.s du 1er degré qui souhaitent approfondir l’histoire de la Libération avec leurs classes. Il fait partie d’une mallette pédagogique contenant des ressources pour les élèves et les enseignant.e.s du 1er degré, élaborée par la Ligue de l’enseignement – Fédération de Paris en partenariat avec la Mairie de Paris.

Fiche N°1

La France entre en guerre

Le 3 septembre 1939, la France déclare la guerre à l’Allemagne après que celle-ci a attaqué la Pologne le 1er. Les hommes sont mobilisés et envoyés sur les fronts de l’est et du nord afin de défendre la ligne Maginot dont la construction symbolise la stratégie défensive de l’État-major français; (http://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/ouvrage-de-la-ferte).
« Avec l’expérience de la Première Guerre mondiale, l’État-major français a fondé sa stratégie sur la défensive et se retranche sur la frontière de l’Est en attendant l’attaque de l’armée allemande. Durant cette période, seules quelques modestes opérations terrestres et aériennes animent le front, d’où le terme de ‘drôle de guerre’ ». (http://www.museedelaresistanceenligne.org/expo.php?expo=108&theme=213).

Cependant, dès le 13 mai les Allemands franchissent la Meuse à Sedan et à Dinant. Deux jours plus tard, les lignes françaises sont anéanties comme l’annonce le président du Conseil, Paul Reynaud, par télégramme à Churchill : « La contre-attaque menée contre les Allemands à Sedan a échoué. La route de Paris est ouverte. La bataille est perdue ».

Dès lors, un exode massif des populations du nord de l’hexagone vers le sud se met en place aux mois de mai et juin. Entre six et huit millions de personnes fuient devant l’armée allemande. Du 10 au 14 juin 1940, pas moins de deux millions de personnes quittent Paris, qui est déclarée « ville ouverte ». Selon le Règlement de la guerre sur terre de La Haye de 1899, non reconnu par les Conventions de Genève, ce statut coutumier désigne une ville dépourvue d’objectifs militaires et qui est prête à tomber sans résistance, à l’issue d’un accord. En se déclarant « ville ouverte », Paris se rend à l’ennemi sans combat et doit donc à ce titre être protégée de toute destruction.

Au sein du gouvernement français, les positions divergent sur la suite à donner ou non aux combats. Paul Reynaud souhaite continuer la guerre mais démissionne face aux voix en faveur de l’armistice.

L’Occupation sous Pétain

Pétain, vainqueur très populaire de Verdun, commandant en chef des armées françaises en 1917 et nommé maréchal de France le 11 novembre 1918, est appelé au gouvernement après l’invasion de la France par l’Allemagne en mai 1940. D’abord nommé ministre d’État, puis vice-président du Conseil, il en devient le président après la démission de Reynaud. Il signe l’armistice avec l’Allemagne le 22 juin 1940 à Rethondes, l’autre avec l’Italie le 24 juin 1940 à Rome. Cela aboutit à la division de la France : l’Alsace et la Moselle sont intégrées au Reich, le nord de la France est administré par Bruxelles, les Italiens s’emparent d’une quinzaine de communes frontalières et Paris devient le siège des forces d’occupation allemandes.

Pétain s’installe alors en juillet à Vichy, en zone dite « libre », et se fait accorder les pleins pouvoirs par le Parlement. Celui qui se nomme lui-même « chef de l’État français » met en place un régime autoritaire et mène une politique de collaboration avec l’Allemagne nazie. Le 24 octobre, Pétain rencontre Hitler à Montoire-sur-le-Loir, puis prononce le 

 30 son discours appelant à la collaboration. De nombreuses réformes sont dès lors édictées : suppression des élections et des centrales syndicales ou encore promulgation d’une charte du travail qui écarte les salariés de la gestion de l’économie… Les réquisitions, le rationnement des denrées alimentaires, les frais d’occupation sont le volet économique de la défaite puisqu’un pillage organisé est mis en place par la puissance occupante. 

Le général de Gaulle appelle, quant à lui, à la résistance le lendemain de la nomination de Pétain, le 18 juin 1940, depuis les ondes de la BBC en Angleterre, où il s’est réfugié. Il crée la France libre en juillet dont le but est de poursuivre la guerre et de libérer la France.

Pour aller plus loin :

 –  Alya Aglan, La France défaite (1940-1945), La Documentation photographique, novembre-décembre 2017.

–  Documentaire Jalons INA « L’offensive allemande de mai 1940 : la débâcle de l’armée française et l’exode » et sa notice historique par Fabrice Grenard : https://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu04532/l-offensive-allemandede-mai-1940-debacle-de-l-armee-francaise-et-exode-des-populations-devant-lavancee-de-la-wehrmacht.html

 

Cette séance vise à comprendre le contexte historique international du début de la Seconde Guerre mondiale qui a conduit à l’Occupation de la France.

Fiche N°2

La ville de Paris, considérée comme « ville ouverte » le 11 juin 1940 (cf. fiche 1 pour l’explication de ce statut coutumier), est occupée dès le 14 juin. L’absence de combats explique que la ville ne subit pas de destructions. Les personnes réfugiées hors de la capitale regagnent progressivement leur domicile suite à l’armistice du 22 juin, signé par le maréchal Pétain.


L’omniprésence et la propagande de l’Allemagne

Le paysage de la ville change alors par cette occupation et la présence de l’armée allemande : des murs sont édifiés aux portes de la ville afin de contrôler les entrées et les sorties, des bâtiments prestigieux, réquisitionnés pour installer des services allemands, sont habillés de drapeaux à croix gammée tandis que des panneaux indicateurs en allemand fleurissent à chaque coin de rue. Le Haut-commandement allemand pour la France (MBF) installe ses services à l’hôtel Majestic. Le gouverneur militaire de Paris s’installe à l’hôtel de Crillon, le siège de la Gestapo avenue Foch tandis que l’hôpital Lariboisière devient l’hôpital allemand, etc. Les nazis s’emparent des richesses et fréquentent les restaurants parisiens de luxe, les plus beaux hôtels, les salles de spectacle. La presse, comme la radio de l’État français, sont totalement sous contrôle. Le couvre-feu est instauré.


Le régime du maréchal Pétain, dont le gouvernement s’est installé à Vichy en zone « libre », occupe les ministères laissés par les Allemands afin de maintenir une présence dans la ville. La propagande allemande et pétainiste s’attache à montrer de Paris l’image d’une ville où la vie est douce et où rien n’a réellement changé.


Le rationnement de la population

Dans ce contexte, les Parisien.ne.s manquent de tout. De nombreuses usines ont été détruites durant l’invasion, les troupes d’occupation pillent les ressources encore existantes, tandis que le blocus instauré par les Anglais aggrave encore la situation. Les premières cartes de rationnement apparaissent dès le 23 septembre 1940. Elles concernent d’abord le pain, les pâtes et le sucre, avant que ce système ne s’étende rapidement à l’ensemble de l’alimentation, mais aussi aux vêtements, chaussures, savon, charbon, essence, tabac, etc. Certaines denrées, comme le café et le chocolat, se font de plus en plus rares. D’autres deviennent plus communes comme les topinambours et les rutabagas. C’est le règne du système D. Le marché noir se développe, accentuant encore les inégalités sociales. Les automobiles étant réservées à l’administration allemande, les Parisien.ne.s se déplacent dans des autobus à gaz, en métro ou encore en vélo.


Une vie souterraine s’installe aussi progressivement dans Paris. La Défense passive crée des abris pour que les Parisien.ne.s s’y réfugient à la moindre alerte. Les galeries du métro et les nombreuses carrières présentes dans le sous-sol parisien, mais aussi les anciennes caves, sont aménagées pour servir de refuges en cas d’attaque au gaz.


Pour aller plus loin :

– L’exposition « Le quotidien des Parisiens sous l’Occupation », créée par le Comité d’Histoire de la Ville de Paris, disponible sur le site dédié :

http://quotidien-parisiens-sous-occupation.paris.fr/dossier_exposition-aux-cordeliers

– À propos du rationnement, lire le dossier du réseau Canopé : « Pour mémoire. Les années noires 1940-1945 » : https://www.reseau-canope.fr/pour-memoire/les-annees-noires-1940-1945/introduction.html.

– Sur les abris, consulter l’ouvrage Abris souterrains de Paris. Refuges oubliés de la Seconde Guerre mondiale, de Gilles Thomas et Diane Dufraisy-Couraud (Parigramme, 2017).

– Sur la présence allemande dans la capitale, lire le volume de La Documentation photographique intitulé La France défaite (1940-1945) par Alya Aglan (n°8120, novembre-décembre 2017) :

https://www.ladocumentationfrancaise.fr/catalogue/3303331281207/index.shtml#

Cette séance vise à appréhender les conditions de vie des Parisien.ne.s sous l’Occupation en engageant les élèves à produire un écrit court racontant la vie d’un.e jeune Parisien.ne pendant cette période. L’activité se construit, d’une part, autour du livret sur la Libération de Paris de la collection « Repères pour éduquer », écrit pour les élèves (faisant partie de la mallette pédagogique éponyme) et, d’autre part, d’un corpus de documents listés ci-dessous.

Fiche N°3

Dès 1940, le gouvernement de Vichy entame sa politique de collaboration qui s’appuie sur une idéologie nationaliste, xénophobe et antisémite. La propagande véhiculant cette idéologie, et mise en place à la fois par les nazis et l’État français, tente de convaincre les Français que leurs véritables ennemis ne sont pas les Allemands, mais bien les Juifs, définis comme des nuisibles qui constituent un risque de pollution pour la race pure aryenne. En Allemagne, ces persécutions concernent également les handicapés mentaux, les Tziganes ou encore les asociaux marginalisés.

La propagande antisémite du gouvernement de Vichy

 Cette propagande est diffusée par le biais de tous les supports de communication à disposition : tracts, affiches, journaux, livres, émissions, conférences, expositions, etc. Le gouvernement de Vichy met d’abord en place un recensement des personnes considérées comme juives, puis retire la naturalisation de 8 000 Juives et Juifs, qui deviennent apatrides. Progressivement, les Juifs sont évincés de l’administration et de nombreuses professions. Leurs heures de sorties sont limitées et de multiples lieux leur sont interdits.

Un Commissariat général aux questions juives est créé le 29 mars 1941 afin de mettre en application la législation antisémite de Vichy. Par la suite, un décret oblige les Juifs de plus de 6 ans à porter l’étoile jaune de façon bien visible sur leurs vêtements. Une loi sur « les ressortissants étrangers de race juive » permet finalement leur internement dans des « camps spéciaux ».

Le pillage des biens juifs par l’occupant

Dans le cadre de cet antisémitisme d’État instauré par le gouvernement de Vichy, les Juifs subissent de véritables spoliations mobilières et immobilières allant du pillage d’œuvres d’art, de meubles, de simples objets du quotidien, à l’expropriation d’appartements et d’entreprises. Ainsi, la loi d’aryanisation économique du 22 juillet 1941 « relative aux entreprises, biens et valeurs appartenant aux Juifs » dépossède légalement ces familles de leurs biens : 

« Dès son arrivée, l’occupant pille les meubles et les œuvres d’art, s’acharnant d’abord sur les biens des Parisiens juifs. Les passants observent ces vols organisés, de même qu’ils constatent l’enlèvement des statues dont les Allemands récupèrent le métal. Rapporté au montant global du pillage économique et financier de la France, celui du pillage des biens des victimes de la persécution antisémite est minime. En revanche, il reste inoubliable pour ce qu’il signifie. En vertu de la “Möbel Aktion”, près de 38 000 appartements de juifs déportés ou réfugiés en province sont vidés de leur contenu pour être envoyé en Allemagne. En 1943, les Allemands créent trois bagnes de juifs à Paris, chargés de trier le matériel volé. Environ 800 hommes et femmes sont passés par ces camps nommés d’après les lieux réquisitionnés à cette fin, “Bassano”, “Austerlitz” et “Lévitan” ».

Extrait du site « Paris 1940-1944. Le quotidien des Parisiens sous l’Occupation » : http://quotidien-parisiens-

Les rafles 

Au printemps 1942, à la demande des Allemands, le gouvernement de Vichy met au point une opération appelée « Vent printanier » consistant à rafler des dizaines de milliers de Juifs parisiens. Les 16 et 17 juillet, la police française arrête ainsi 12 884 hommes, femmes et enfants juifs. C’est la rafle du Vel d’Hiv, ainsi nommée car les familles sont emmenées au Vélodrome d’Hiver pour y être détenues pendant plusieurs jours dans d’horribles conditions. Elles seront ensuite emmenées dans des camps français, avant d’être déportées dans le camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz-Birkenau (Jean-Pierre Azéma, De Munich à la Libération, la France à l’heure allemande, Le Seuil, Paris, p. 183).

Depuis les travaux pionniers de Robert Paxton publiés en 1972 et traduits en français en 1999 sous le titre La France de Vichy, la responsabilité des autorités françaises dans la répression qui s’abat sur la population juive est avérée, sans que soit pour autant remise en question la pression exercée alors par la force d’occupation. Laurent Joly, auteur d’une synthèse intitulée L’État contre les juifs. Vichy, les nazis et la persécution antisémite (Grasset, 2018), a donné une longue interview au journal The Times of Israël (23 octobre 2018) sur la politique antisémite du régime de Vichy. La conclusion de l’interview de Laurent Joly insiste sur la responsabilité de Pétain dans la mort des 74 510 Juifs déportés, dont un tiers de Français, à destination d’Auschwitz-Birkenau : 

« Toutes les conditions sont réunies pour que le pire se réalise… Oui, et il se réalise en 1942, quand les nazis réclament 40 000 Juifs. Vichy les leur livre (et même plus : près de 42 000 déportés à la fin de l’année) en échange de l’autonomie d’action de la police française (l’obsession de Bousquet) et à la condition de ne viser que les apatrides (surtout de zone libre, que les Allemands ne demandent pas mais dont Vichy est trop heureux de se débarrasser). Telle est la politique de l’État français. Pétain, Laval, Bousquet ne voulaient pas tuer les Juifs. Ce n’était évidemment pas, comme pour les nazis, l’objectif de leur politique. Mais, ce que je montre dans un chapitre (« Que savait-on de la politique d’extermination ? »), c’est qu’ils ont fait le choix de ne pas se poser de questions et de s’aveugler sur une politique dont il ne pouvait pas ne pas se douter qu’elle conduisait à la mort des Juifs – dont un tiers de Français que Vichy, devenu un État fantoche, livre massivement en 1943-1944. C’est bien une politique criminelle que Laval et Bousquet ont choisi de prendre en charge, convaincus qu’ils étaient que l’Allemagne gagnerait la guerre et que l’histoire oublierait. Avec des arguments renouvelés, mon livre rappelle cette évidence depuis les travaux de Billig, Paxton et de Klarsfeld, mais qui se trouve de plus en plus contestée dans l’espace public. »

https://fr.timesofisrael.com/laurent-joly-lantisemitisme-criminel-de-vichy-decoulait-bien-dunchoix/?fb clid=IwAR18yIqLRoLk2BmNRyjdiWtcD9yGV0I_61vh1ao69jvGZGYBXqGmTMMmxdY.

Pour aller plus loin :

 – Claire Zalc, Dénaturalisés : les retraits de nationalité sous Vichy, Le Seuil, 2016.

 – Site du Mémorial de la Shoah, réalisé avec le soutien du Ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse :
http://www.enseigner-histoire-shoah.org/outils-et-ressources/fiches-thematiques/le-regime-de-vichy-etles-juifs-1940-1944/la-politique-antisemite-des-allemands-et-du-gouvernement-de-vichy.html

Cette séance vise à montrer comment le gouvernement de Vichy met en place sa politique de persécution des Juifs en s’appuyant sur le principe d’inégalité entre les différentes catégories de la population française.

Fiche N°4

À Paris, dès les débuts de l’Occupation, différentes formes de résistance apparaissent. Elles sont le fruit d’initiatives personnelles ou de petits groupes qui progressivement s’organisent. Elles prennent le plus souvent une forme clandestine mais elles s’expriment parfois courageusement dans des regroupements publics, telle la manifestation des lycéens et étudiants du 11 novembre 1940, place de l’Étoile, ou s’affichent par des inscriptions sur les murs, des papillons, etc. Elles fluctuent tout au long de la guerre au gré des arrestations et des actions.

Les travaux historiques sur la Résistance insistent sur la place particulière de Paris dans cette histoire complexe des formes de résistance. Voici une analyse de la manifestation du 11 novembre 1940, place de l’Étoile, qui interroge par sa dimension collective :

  • « Insoumission, adaptation contrainte, résistance, simultanément ou successivement, tels sont les comportements ordinaires des “résistants” dans la société de leur temps. Le premier risque d’une histoire de la Résistance limitée aux organisations de résistance tient à cela : oublier les hommes résistants derrière la Résistance, autrement dit en faire de purs héros séparés par essence du reste des Français. La même complexité surgit lorsque l’on passe du collectif à l’individuel. S’il n’est pas trop malaisé de qualifier une action collective d’acte de résistance, il devient plus problématique d’en déduire (et selon quels critères ?) que ses auteurs sont ou non des résistants. Prenons pour exemple la manifestation des étudiants du 11 novembre 1940, place de l’Étoile, à Paris. Par sa dimension patriotique, franchissant l’interdit, elle constitue bien un acte de résistance. Mais s’ils sont quelque trois mille à manifester ce jour-là, qui pourrait croire qu’il y avait alors à Paris autant de résistants engagés dans des orga-nisations clandestines ? » 
  • François Marcot, « Comment écrire l’histoire de la Résistance ? », Le Débat, 2013/5, n° 177, p. 176.

Selon Sylvie Zaidman, directrice du musée de la Libération de Paris, la définition de la Résistance, toujours réinterrogée par la recherche, semble se caractériser par le passage à l’action. Dans ce sens, les étudiants du 11 novembre 1940 font bel et bien œuvre de Résistance. Une résistance ponctuelle, sur un objet précis. La question se pose encore plus fortement pour ceux et celles qui ne font que détourner la tête, ceux qui ne donnent pas à la police une information apprise par hasard, ceux qui ont un geste de pitié vis-à-vis des pourchassés. Ce ne sont pas des résistants au sens « engagement » du terme et pourtant ces gens-là ont été parfois déterminants pour sauver une vie (voir l’ouvrage de Jacques Sémelin, Persécutions et entraides dans la France occupée. Comment 75% des juifs en France ont échappé à la mort, Les Arènes, Seuil, 2013).

Les groupes et acteurs de la Résistance

Après l’appel du Général de Gaulle, les hommes et les femmes qui décident de se joindre à lui sont quelques milliers :
c’est la naissance des Forces françaises libres (FFL), qui vont se battre aux côtés des Alliés. Sur le territoire français, différents mouvements de résistance voient le jour dès 1941, principalement à Paris. (voir sur le site HAL, archives-ouvertes.fr, l’article de Charles Riondet, « De Gaulle et l’organisation de la résistance à Paris », https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01301278/file/degaulle-resistance-parisienne.pdf.

À l’automne 1942, les mouvements de Résistance intérieure française s’organisent et essaient de se coordonner, mais principalement en zone sud, sous l’influence de Jean Moulin. L’occupation totale du territoire français redonne à Paris un rôle prééminent. Le 27 mai 1943 est créé le Conseil national de Résistance (CNR), rue du Four. Paris est alors la capitale de la Résistance intérieure.

Une organisation clandestine destinée à unir les forces de la Résistance et à assumer les pouvoirs municipaux à la libération voit le jour à l’automne 1943 ; il s’agit du Comité parisien de la libération (CPL) présidé par André Tollet. Le CPL est issu des syndicats ouvriers et des mouvements de résistance de toutes tendances (Ceux de la Libération, Ceux de la Résistance, CGT, Front National, Libération-Nord, Organisation Civile et Militaire, Parti communiste, Parti socialiste). Il incite les Parisien.ne.s à manifester et à contester l’autorité des Allemands et de l’État français.
« Avec la création du Comité parisien de la libération, des relations plus poussées et plus directes se créent entre les mouvements de résistance parisiens et la France libre. C’est d’ailleurs un des buts de la création de ces comités de libération, échelon de l’administration parallèle voulue par Londres et De Gaulle, dans la volonté d’assurer son autorité face aux Américains »https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01301278/file/degaulle-resistance-parisienne.pdf


Pour aller plus loin :

 – Le glossaire du CNRD : https://www.reseau-canope.fr/cnrd/glossaire/A ;

– Le glossaire de l’ouvrage Enseigner la Résistance publié par Canopé éditions en 2016.

Cette séance vise à travailler sur les acteurs de la Résistance et de la libération de Paris. L’activité se construit à partir d’un relevé d’informations dans divers documents, puis d’une restitution des recherches devant la classe.

Liste d’acteurs de la Résistance et de la libération de Paris. Les biographies reproduites ci-dessous sont extraites du site du musée de l’Ordre de la Libération : http://www.ordredelaliberation.fr/fr/musee.

GEORGES BIDAULT (Alias : Rousseau – BIP)

Georges Bidault est né le 5 octobre 1899 à Moulins dans l’Allier. Son père était directeur d’assurances. Après des études chez les Jésuites, il prend part à la Première guerre mondiale. Reçu premier à l’agrégation d’histoire en 1925, il enseigne à Valenciennes (1925-1926), à Reims (1926-1931) puis au lycée Louis-le-Grand à partir de 1931. Chrétien fervent, il s’inscrit la même année au Parti démocrate populaire (PDP), issu du Sillon. Éditorialiste depuis 1934 de l’Aube, d’inspiration démocrate-chrétienne, antinazi, il se signale en septembre 1938 par un éditorial anti-munichois. Mobilisé sur sa demande, il est fait prisonnier en 1940. Libéré d’Allemagne il regagne Paris en juillet 1941. Ne pouvant exercer comme journaliste en raison de ses opinions, Georges Bidault s’installe en zone sud en octobre 1941. Professeur au lycée du Parc à Lyon, il entre rapidement au comité directeur du mouvement de résistance « Combat », fondé en zone sud par Henri Frenay. En février 1942 il devient rédacteur en chef du journal clandestin Combat.

En avril 1942, il accepte de diriger, à l’initiative de Jean Moulin qu’il a rencontré quelques mois plus tôt, une véritable agence de presse clandestine : le « Bureau d’Information et de Presse » (BIP) de la Délégation générale. Il quitte donc la rédaction en chef de Combat. et, assisté de Pierre Corval, forme une équipe de journalistes parmi lesquels Rémy Roure (ancien de Combat.), Louis Terrenoire et Yves Farge. Le BIP publie le Bulletin d’Informations générales destiné à la fois aux mouvements et à Londres. La parution des Bulletins est très fréquente, parfois quotidienne. Au printemps 1943, en accord avec Jean Moulin, il entre au comité directeur du mouvement Front national de zone sud. Membre du Conseil national de la Résistance (CNR) à sa fondation en mai 1943, il y représente le Parti démocrate populaire. Ayant quitté Lyon pour Paris, révoqué de l’enseignement, il vit dans une totale clandestinité.

En septembre 1943, il est élu président du CNR à la suite de la disparition de Jean Moulin. Devant les risques de réunir les membres du CNR au complet, il est décidé de créer un bureau restreint de cinq membres. Georges Bidault préside, plusieurs fois par semaine, toutes les réunions du bureau du CNR. Il s’attache à renforcer l’unité de la Résistance en prévision de son rôle dans les combats de la Libération. Il assume la représentation de la Résistance auprès du général de Gaulle qui l’appelle au poste de ministre des Affaires étrangères du Gouvernement provisoire le 9 septembre 1944.

En novembre 1944, il est un des fondateurs du Mouvement républicain populaire (MRP) et est élu député de la Loire sans interruption de 1945 à 1956 puis en 1958. Il est président (1949) puis président d’honneur du MRP (1952). De la Libération à 1954, Georges Bidault est également deux fois Président du Conseil, vice-président des cabinets Queuille, Pleven, Edgar Faure, ministre de la Défense et quatre fois ministre des Affaires étrangères. Partisan farouche de l’Algérie française, il quitte la France en mars 1962, à la veille de l’indépendance de l’Algérie. En juillet 1962, son immunité parlementaire est levée après qu’il a fondé à l’étranger un « CNR » visant à défendre l’Algérie française. Réfugié au Brésil jusqu’en 1967, il réside ensuite en Belgique puis rentre en France en juin 1968. Georges Bidault est décédé à Cambo-les-Bains, dans les Pyrénées-Atlantiques, le 27 janvier 1983. Il a été inhumé à La Celle les Bordes dans les Yvelines.

Distinctions :

• Grand-Croix de la Légion d’Honneur

• Compagnon de la Libération – décret du 27 août 1944

• Médaille de la Résistance française avec rosette


LAURE DIEBOLD (Alias : Mona – Mado)

Laure Diebold, de son nom de jeune fille Laure Mutschler, est née le 10 janvier 1915 à Erstein (Bas-Rhin), seconde enfant d’un père ébéniste et d’une mère restauratrice. Après des études secondaires à Sainte-Marie-aux-Mines où la famille s’établit en 1920, elle devient secrétaire sténodactylo bilingue français-allemand dans une entreprise locale. Puis, elle entre en 1935 aux usines Elastic à Saint-Louis (Haut-Rhin) jusqu’en 1939. Ensuite, elle est secrétaire d’un industriel à Saint-Dié dans les Vosges.

Après l’armistice, elle demeure en Alsace et rejoint une organisation de passeurs pour les prisonniers évadés. Repérée par l’occupant, elle quitte l’Alsace à la veille de Noël 1941 et parvient à Lyon, cachée dans une locomotive. Elle y retrouve son fiancé, Eugène Diebold, prisonnier évadé, qui la fait embaucher comme secrétaire au service des réfugiés d’Alsace-Lorraine. Jeune mariée, elle entre à partir de mai 1942 au réseau de renseignements « Mithridate », où, en qualité d’agent de liaison et d’évasion, catégorie P1, elle recueille des informations qu’elle code et fait passer sous forme de courrier à Londres. Laure Diebold est arrêtée une première fois le 18 juillet 1942 par la police judiciaire deux jours avant son mari ; n’ayant rien dit, ils sont relâchés le 24 juillet faute de preuves. Elle se réfugie à Aix-les-Bains, passe dans la clandestinité la plus totale et devient « Mona ».

À la mi-août 1942, elle rencontre Daniel Cordier, secrétaire de Jean Moulin, par l’intermédiaire de Madame Moret qui travaille comme elle au service des réfugiés d’Alsace-Lorraine. Engagée aux Forces françaises libres, immatriculée au Bureau central de renseignements et d’action (BCRA) sous le nom de « Mado », elle est affectée aux services de Jean Moulin, représentant du général de Gaulle et délégué du Comité national français, en qualité d’agent P.2 avec le grade de lieutenant. Laure Diebold fait preuve d’une activité extraordinaire, travaillant jour et nuit, à son domicile de la banlieue de Lyon, pour la Délégation générale dont elle est la dactylo. Pendant plusieurs semaines, le secrétariat de la Délégation générale fonctionne uniquement avec Daniel Cordier, Laure Diebold et Hugues Limonti.

En janvier 1943, elle s’installe dans un bureau près de la place des Terreaux, ce qui facilite le travail du secrétariat de la Délégation. Fin mars 1943, sur décision de Jean Moulin qui souhaite installer ses services dans la Capitale, elle s’installe à Paris avec Cordier et Limonti.

Après l’arrestation de Jean Moulin, en juin 1943, elle demeure à Paris où s’est installée la Délégation générale et continue le même travail aux côtés de Claude Bouchinet-Serreulles et de Georges Bidault. La difficulté de trouver un local la contraint à travailler dans sa chambre, chez son beau-frère, à Fontenay-aux-Roses pendant quelques semaines avant de pouvoir s’installer à Paris, rue Vavin. Elle qui n’ignore presque rien de l’organisation de la Résistance est à nouveau arrêtée en compagnie de son mari, à Paris, rue de Grenelle, le 24 septembre 1943 et conduite à Fresnes ; elle réussit à convaincre la Gestapo qu’elle n’a fait que servir de boîte aux lettres et échappe ainsi à la torture.

Le 17 janvier 1944, Laure Diebold est dirigée vers Sarrebruck puis internée à Strasbourg du 28 janvier au 13 juin 1944. Déportée ensuite au camp de sûreté de Schirmeck, elle est internée successivement à Mulhouse, Berlin puis au camp de Ravensbrück. Transférée près d’Altenburg, au kommando de Meuselwitz qui dépend de Buchenwald, elle est affectée à partir du 6 octobre 1944, au kommando de Taucha (près de Leipzig) dépendant aussi de Buchenwald. Gravement malade, promise au four crématoire, elle est sauvée par un médecin tchèque du laboratoire du camp qui escamote sa fiche à deux reprises. Libérée en avril 1945 par les Américains, très affaiblie, elle arrive à Paris un mois plus tard et, conduite à l’Hôtel Lutetia, elle a le bonheur d’y retrouver son mari, également de retour de déportation. En dépit d’une santé très altérée par les épreuves subies en déportation, elle recommence aussitôt à travailler, à Paris dans les services de la Direction générale des Etudes et Recherches (DGER) puis, à partir de 1957, à Lyon dans une entreprise où elle est successivement secrétaire puis bibliothécaire. Laure Diebold meurt subitement le 17 octobre 1965 à Lyon et est inhumée en Alsace, à Sainte-Marie-aux-Mines, dans le Haut-Rhin.

Distinctions :

• Chevalier de la Légion d’Honneur

• Compagnon de la Libération – décret du 20 novembre 1944 • Croix de Guerre 39/45

• Médaille des Services Volontaires dans la France Libre


RAYMOND DRONNE

Issu d’une famille d’agriculteurs, Raymond Dronne est né le 8 mars 1908 à Mayet (Sarthe). Il fait ses études au lycée du Mans puis aux universités de Leipzig et de Berlin, à la faculté de droit de Paris. Docteur en droit, il est également diplômé de l’École des Sciences politiques et sort major de l’École de Journalisme et de l’École coloniale. Il effectue son service militaire dans l’Infanterie métropolitaine en 1931-1932 et, après avoir suivi les cours d’EOR de Saint-Maixent, est nommé sous-lieutenant. Administrateur d’Outremer au Cameroun, il est adjoint des services civils à Douala de 1934 à 1936.

Après un stage d’un an à l’École de la France d’Outremer, il retourne au Cameroun au Bureau des Finances puis comme juge de paix. Mobilisé sur place en septembre 1939 comme lieutenant, il est affecté aux forces de Police du Cameroun. Il prend une part active, à Yaoundé, au ralliement de la ville à la France libre le 28 août 1940. Engagé dans les Forces françaises libres, il participe aux opérations du Gabon avec le Régiment de tirailleurs du Cameroun (RTC). De retour au Cameroun, il prend le commandement d’une compagnie du Bataillon de marche n° 5 en cours d’instruction. Il est promu capitaine le 1er mars 1941. Puis il forme et entraîne à Douala un corps franc avant d’être affecté à la Compagnie de découverte et de combat du Cameroun.

À la fin de 1941, il est muté au Groupe nomade du Borkou au Tchad et participe aux opérations du Fezzan et notamment à la prise d’Oum El Araneb. Il combat en Tripolitaine puis en Tunisie, où il est grièvement blessé, au Ksar Rhilane, le 10 mars 1943, par mitraillage d’avion en allant se poster pour surveiller l’avance des blindés allemands. Soigné en Égypte, il rejoint le Régiment de marche du Tchad (RMT) dont il commande la 9e Compagnie, la Nueve, essentiellement composée de volontaires espagnols.

Il participe à la campagne de France avec la 2e Division blindée du général Leclerc et se distingue à la prise d’Ecouché à la tête de sa compagnie avec laquelle il coupe une colonne ennemie, avant de s’installer défensivement dans un secteur très difficile, détruisant chars blindés, camions, contre-attaquant l’ennemi composé d’unités SS et de Panzers et lui infligeant chaque jour de grosses pertes dont plus de 300 prisonniers ; il contribue ainsi au maintien de la position tout en gênant la retraite allemande. Il conduit dans Paris, jusqu’à l’Hôtel de Ville et la Préfecture de Police, où les patriotes sont cernés par les forces allemandes, le premier détachement de la 2e DB dans la soirée du 24 août 1944. Il s’illustre encore à Vacqueville en Meurthe-et-Moselle où il enlève le village âprement défendu par l’ennemi, le conservant malgré un violent tir d’artillerie. Il prend part activement ensuite aux campagnes d’Alsace et d’Allemagne où, commandant un détachement d’Infanterie et de chars, il accomplit avec succès contre un ennemi encore résistant, des opérations de harcèlement et de nettoyage dans la région ouest de Berchtesgaden, qui aboutissent à la prise d’un important matériel et de 1 200 prisonniers.

Raymond Dronne commande ensuite un bataillon d’Infanterie blindée en Cochinchine et au Tonkin. Il termine la guerre avec le grade de chef de bataillon. Promu colonel en 1947, il quitte l’Armée et se consacre à la vie politique et à l’écriture. Maire d’Ecommoy (Sarthe) de 1947 à 1983. Sénateur (1948-1951) puis député de la Sarthe (1951-1962) et de nouveau député (1968-1978), il est président de la Commission de la Défense Nationale à l’Assemblée (1976-1978) Raymond Dronne est décédé à Ecommoy, le 5 septembre 1991. Il à été inhumé à Mayet dans la Sarthe.

Distinctions :

• Grand Officier de la Légion d’Honneur

• Compagnon de la Libération – décret du 29 décembre 1944 • Croix de Guerre 39/45 (7citations)

• Croix de Guerre des TOE (2 citations) • Médaille de la Résistance

• Médaille Coloniale

• Médaille des Blessés

• Commandeur de l’Etoile Noire (Bénin)


CHARLES DE GAULLE

Charles de Gaulle est né à Lille le 22 novembre 1890 dans une famille catholique et patriote. À sa sortie de l’École militaire de Saint-Cyr en 1912, il choisit l’infanterie qu’il juge « plus militaire ». Pendant la Première Guerre Mondiale, blessé, il est fait prisonnier en 1916. Après plusieurs tentatives d’évasion, il est enfermé dans la forteresse d’Ingolstadt. Dans l’entre-deux-guerres, il réfléchit à une réforme de l’armée. Dans son ouvrage, Vers l’Armée de métier, publié en 1934, il préconise l’usage d’un corps de blindés.

Colonel en 1937, général à titre temporaire à la fin mai 1940, de Gaulle est appelé par Paul Reynaud, président du Conseil, comme sous-secrétaire d’État à la Défense nationale et à la Guerre, le 5 juin. Le 16 juin, de retour de mission en Angleterre, il apprend la demande d’armistice. Il repart aussitôt pour Londres afin de poursuivre la guerre, et lance un appel à la résistance, sur les ondes de la BBC, le 18 juin.

Grâce à sa détermination et à l’appui de Churchill, il organise des forces armées qui deviendront les Forces françaises libres, crée un Comité national français avec l’aide de René Cassin, qui deviendra le Comité français de la Libération nationale le 3 juin 1943 puis le Gouvernement provisoire de la République française un an plus tard. Pendant ces années de guerre, il rallie progressivement les territoires de l’Empire, réalise l’union avec la Résistance intérieure, avec Jean Moulin, et fait de la France l’un des États vainqueurs, aux côtés des Alliés, Grande-Bretagne, États-Unis et Union soviétique. Président du Gouvernement provisoire, de Gaulle, en désaccord avec l’Assemblée constituante sur la conception de l’État, démissionne le 20 janvier 1946.

Dans son discours de Bayeux,le 16 juin 1946, il expose un véritable projet constitutionnel avec un exécutif fort, germe de ce que sera la Constitution de la Ve République. Le 14 avril 1947, il lance un mouvement, le Rassemblement du Peuple français (RPF), qui, s’il remporte d’abord de grands succès aux élections municipales, ne rencontre pas l’impact espéré lors des législatives de 1951. Mais le RPF forme et mobilise des militants, crée un encadrement qui se révélera important en 1958.

L’impuissance de la IVe République face à la question algérienne conduit bon nombre de responsables politiques de tous bords à souhaiter le retour du Général. Après la crise du 13 mai 1958 à Alger, le Président de la République, René Coty, décide de faire appel « au plus illustre des Français ». Charles de Gaulle devient alors, le 1er juin, le dernier président du Conseil de la IVe République. Il reçoit les pleins pouvoirs, et fait élaborer une Constitution qui sera adoptée par référendum le 28 septembre 1958, avec 79,2% de « oui ». Les différents territoires de l’Empire l’approuvent également, sauf la Guinée qui devient ainsi le premier État d’Afrique à obtenir son indépendance. De Gaulle est élu par un collège électoral, le 21 décembre suivant, Président de la République française et de la Communauté africaine et malgache. La tâche la plus urgente concerne l’Algérie. De Gaulle multiplie les voyages et s’achemine vers la solution de l’indépendance : après l’offre de « la paix des braves » en octobre 1958, il propose l’autodétermination aux Algériens l’année suivante. Le putsch des généraux le 22 avril 1961 échoue et n’empêche pas l’ouverture de négociations avec le FLN. Les accords d’Evian, signés le 22 mars 1962, acceptés par référendum en France et en Algérie, accordent l’indépendance à celle-ci.

L’année 1962 marque un véritable tournant. Libéré de la guerre d’Algérie, mais non de ses séquelles (rapatriement des Français, attentats de l’OAS), le chef de l’État s’attache à mener une politique d’indépendance nationale renforçant ainsi le rang de la France.
Poursuivant la politique nucléaire de la IVe République, la première bombe atomique française éclate à Reganne en février 1960. Refusant la tutelle des États-Unis, de Gaulle retire peu à peu la France du système intégré de l’OTAN (ce sera chose faite en 1966), tout en restant membre de l’Alliance atlantique. Cherchant à construire une Europe réellement européenne, il se rapproche de l’Allemagne fédérale en signant le Traité de l’Élysée (22 janvier 1963), et refuse l’entrée de la Grande-Bretagne, trop liée aux États-Unis, dans la Communauté économique européenne. Il renforce la CEE avec la politique agricole commune en 1963.
Mener « une politique des mains libres », c’est aussi renforcer la présence de la France dans le monde auprès des États nés de l’ancienne Communauté africaine et malgache, indépendants depuis 1960, mais aussi en Asie et en Amérique latine. En 1964, de Gaulle reconnaît la République populaire de Chine. Il effectue un long voyage en Amérique latine. Il prononce un discours à Phnom-Penh en 1966 dans lequel il stigmatise la politique américaine au Vietnam. En juillet 1967, le « Vive le Québec libre ! » accentue l’opposition du Général à l’impérialisme américain, tout en défendant la présence historique de la France en Amérique du Nord. Mais aussi, de Gaulle se rapproche de l’Union soviétique et de ses États satellites, pour construire « l’Europe de l’Atlantique à l’Oural ». La politique de « Détente, Entente et Coopération » est amorcée par un voyage en URSS en juin 1966. Au demeurant, le général de Gaulle n’a jamais failli à sa fidélité au bloc occidental et par exemple, lors de la crise de Cuba en 1962, il a été le premier à soutenir Kennedy contre Khrouchtchev.

Une France puissante ne se conçoit pas sans institutions stables. La Constitution de la Ve République voulue par le général de Gaulle en est l’outil principal, mais il faut que l’exécutif soit renforcé par le soutien populaire : le recours au référendum lors de choix importants : sur l’autodétermination des Algériens (8 janvier 1961), les accords d’Evian (8 avril 1962), la réforme constitutionnelle (28 octobre 1962), la régionalisation et la réforme du Sénat (27 avril 1969) ne suffit pas.

Après l’attentat du Petit-Clamart, le 22 août 1962, le Général propose l’élection du chef de l’État au suffrage universel, afin de lui assurer une légitimité nécessaire face aux députés. L’élection présidentielle est, depuis, un des éléments majeurs de la participation des citoyens à la vie politique. En 1965, l’élection au suffrage universel est mise en pratique pour la première fois. Après son premier mandat de sept ans, de Gaulle est élu au second tour face à François Mitterrand, avec 54,8% des voix.

Le Général souhaitait une réforme de la société allant dans le sens de plus de participation à la vie des entreprises notamment. Après la réforme financière de 1958, la France bénéficie de la croissance amorcée sous la IVe République. Mais elle « s’ennuie » et les événements de Mai 1968 en sont le révélateur. À la contestation des étudiants s’ajoute le mécontentement des ouvriers. Il dissout l’Assemblée nationale le 30 mai. C’est le 27 avril 1969 qu’un projet différent, portant sur la régionalisation et la réforme du Sénat, proposé aux Français, est rejeté par 52,4% des voix. À cette occasion, Charles de Gaulle avait engagé sa propre légitimité. Fidèle à sa promesse et respectueux du peuple souverain, de Gaulle démissionne le lendemain.

Il se retire à Colombey-les-Deux-Églises, s’abstient de toute prise de position publique, et poursuit l’écriture de ses mémoires. Les Mémoires de Guerre avaient commencé de paraître en 1954. Seul le premier volume des Mémoires d’espoir est achevé lors que Charles de Gaulle meurt, le 9 novembre 1970. Pendant qu’à Notre-Dame de Paris a lieu une cérémonie officielle avec les autorités de l’État et les personnalités étrangères, il est enterré au cimetière de Colombey en présence de sa famille, des Compagnons de la Libération et des habitants de son village.


JACQUES DE GUILLEBON

Jacques de Guillebon est né le 13 octobre 1909 à Lunéville ; son père est officier de cavalerie. Après des études dans divers établissements religieux à Dôle, Amiens, Lille, Neuilly et Versailles, il entre en 1930 à Polytechnique. Nommé sous-lieutenant en 1932, il est affecté à l’École d’application d’artillerie de Fontainebleau puis, en août 1934, au 2e Régiment d’artillerie coloniale (2e RAC). Promu lieutenant en septembre 1934, il est désigné pour partir en Côte française des Somalis où il séjourne d’octobre 1935 à octobre 1937. Le lieutenant de Guillebon est affecté en Afrique équatoriale française au Régiment de tirailleurs sénégalais du Tchad (RTST) à compter de mai 1939.

Il entend l’Appel du 18 juin à Fort-Lamy. Capitaine-adjoint du colonel Marchand, commandant les troupes du Tchad, il participe au ralliement du territoire à la France libre le 26 août 1940. À ce titre, il est condamné à mort et à la dégradation par le Tribunal militaire de Riom pour « atteinte à la sûreté extérieure de l’État ».

Le RTST, rallié en bloc sur son propre territoire est placé sous les ordres du colonel Leclerc le 3 décembre 1940. Commandant son groupement, Guillebon participe à l’expédition de reconnaissance sur Koufra. Il se distingue lors de la destruction de l’aérodrome près du Fort d’El Tag où, le 7 février 1941, il lance ses voitures et incendie deux avions. Les 18 et 19 février lors du siège de Koufra, il maintient au combat les éléments autos pris sous le feu et règle le tir de mortier, contraignant l’ennemi à la retraite. Il est aux côtés de Leclerc lors de la reddition du Fort le 1er mars 1941.
Jacques de Guillebon est nommé Compagnon de la Libération le 14 juillet 1941.

En février 1942, Leclerc lance une opération de raids sur le Fezzan, les Britanniques ayant renoncé à une attaque massive sur la Tripolitaine. Le détachement Guillebon comportant 66 hommes, 22 véhicules, 1 arme lourde et 1 mortier, 1 élément médical et 11 camions, suit l’itinéraire Bardaï – Yechti – Brach, et se met en route le 22 février. Le 1er mars, il prend le poste de Tmessali, réquisitionne munitions et matériels utilisables et se retire après avoir détruit les installations radio et mis le feu. Il prend ainsi un autre poste ennemi et inflige de sérieuses pertes à un troisième. Le 14 mars tous les éléments qui ont participé à l’opération sont de retour à Zouar.

En avril 1942, il est promu chef d’escadron et nommé au commandement de l’artillerie du Tchad puis, en novembre suivant, nommé chef d’état-major de la Colonne Leclerc. C’est à ce titre qu’il participe à la seconde campagne du Fezzan en décembre 1942-janvier 1943. Chef d’état-major de la Force L (nouvelle appellation de la Colonne Leclerc), il prend part à la campagne de Tunisie au cours de laquelle il est blessé par éclat d’obus, le 24 avril 1943.

Rapatrié en Grande-Bretagne en avril 1944 avec la 2e DB dont il est sous-chef d’État-major, il débarque en Normandie le 1er août 1944. Commandant un sous groupement puis un groupement tactique de la 2e DB pendant la campagne de France, il est un des premiers à entrer dans Paris.

Promu lieutenant-colonel le 1er septembre 1944, il se distingue à nouveau particulièrement dans la campagne de Champagne, puis dans les opérations de la Marne à la Meurthe, où pendant deux mois Leclerc va avoir à faire face à un adversaire de taille : Von Manteuffel, commandant la Ve Armée blindée allemande.

Le 19 septembre 1944 Jacques de Guillebon prend Fontenay et Glonville-sur-Meurthe en aval de Baccarat, puis, entre le 31 octobre et le 1er novembre, réussit à libérer neuf villages poussant dans un élan irrésistible ses sous groupements au-delà même des objectifs désignés, permettant la capture de plus de 300 prisonniers et la prise d’un important matériel.

Baccarat pris, il reste 120 km pour gagner Strasbourg à travers la Lorraine, les Vosges, l’Alsace. Le gros du groupement de Guillebon force Badonvillers, un difficile débouché vers le Nord, le 16 novembre 1944, et livre le soir même un dur combat à Bréménil. Le lendemain, il prend Petitmont-Val et Châtillon. Le 21 novembre à Cirey, il enfonce la Vor-Vogesen-Stellung et le 23, il va batailler toute la journée aux alentours du pont de Kehl. Avec un bataillon américain, il entre dans Strasbourg par les ponts de l’Ill et obtient à 18 heures la reddition de tous les blockhaus avoisinants.
Il est à nouveau cité pour les derniers combats de libération de l’Alsace où les Allemands, en liaison avec l’offensive des Ardennes, attaquent vers Sarrebourg et Saverne. La Division Leclerc barre la route vers Puttelange et Sarre-Union, reprend Adron et Gros-Rederching, puis va participer avec la 1ère Armée à la libération de Colmar. Le dégel rend les opérations particulièrement difficiles autour d’Obernai et de Molsheim. Le lieutenant-colonel de Guillebon termine la guerre à Berchtesgaden où, selon les termes de sa citation au grade de commandeur de la Légion d’Honneur, il a « l’honneur et la joie de faire flotter le drapeau français ». Colonel en juin 1945, il part pour l’Indochine le 25 novembre 1945. Il y séjournera jusqu’à fin août 1946. Attaché militaire à Berne de janvier 1948 à mai 1951, il est l’année suivante auditeur du Centre des hautes études militaires (CHEM).

Nommé commandant de la Subdivision de Gabès et des Territoires sud tunisiens le 6 septembre 1952, Jacques de Guillebon est promu général de brigade le 1er mai 1955 avant de commander l’École polytechnique (1957-1959).

Nommé membre du Conseil de l’Ordre de la Libération en 1958, il est promu général de division le 10 mars 1959 puis, sur sa demande, rayé des contrôles de l’armée le 21 janvier 1960.

Rappelé à l’activité à compter du 15 septembre 1961 le général de Guillebon est nommé commandant de la 5e Région militaire puis promu général de corps d’armée le 1er juillet 1962.

Directeur de l’IHEDN et du CHEM de janvier 1966 à octobre 1969, il prend ensuite sa retraite.

Jacques de Guillebon est décédé à Paris, le 25 février 1985 à l’hôpital du Val-de-Grâce. Il a été inhumé à Essertaux dans la Somme.

Distinctions : 

• Grand Officier de la Légion d’Honneur 

• Compagnon de la Libération – décret du 14 juillet 1941 

• Grand Croix de l’Ordre National du Mérite 

• Croix de Guerre 39-45 (10 citations) • Croix des TOE (2 citations)

• Croix de la Valeur Militaire 

• Médaille Coloniale avec agrafes « Côte des Somalis », « Koufra », « Fezzan », « Fezzan-Tripolitaine » 

• Médaille des Blessés 

• Commandeur du Nicham Iftikar (Tunisie)

• Grand Officier de l’Ordre Royal du Cambodge 

• Grand Officier de l’Etoile d’Anjouan (Comores)


MARCELLE HENRY

Marcelle Henry est née le 7 septembre 1895 à Angers (Maine-et-Loire) où son père est alors inspecteur départemental du Travail dans l’industrie. Après des études secondaires au lycée de jeunes filles de Limoges puis au cours secondaire du 15e arrondissement à Paris (1908-1912), elle intègre le lycée Victor Duruy, deux ans après la mort de son père. Bachelière, licenciée en Histoire-Géographie, possédant par ailleurs un bon niveau en anglais, elle enseigne pendant trois ans de 1915 à 1919, d’abord au collège de garçons de Chatillon sur Seine (Côte d’Or) puis au collège de Langres (Haute-Marne).

En septembre 1919, Marcelle Henry, suivant la tradition paternelle, entre au ministère du Travail où elle est d’abord auxiliaire temporaire puis secrétaire auxiliaire. En 1920, elle passe brillamment le concours de rédacteur et est titularisée en 1922. Après le décès de sa mère en 1925, elle se retrouve chargée de famille et doit prendre entièrement à sa charge son frère aîné, Victor, qui, atteint depuis son jeune âge d’une maladie incurable, est inapte au travail. Promue sous-chef de bureau en 1931 elle dirige, au ministère, place de Fontenoy, à partir de 1937, le bureau de l’hygiène et de la sécurité des travailleurs de la Direction du Travail.
Catholique fervente, elle prend position contre la collaboration dès les lendemains de l’armistice et développe une atmosphère de résistance au sein du ministère. Elle entre en liaison avec la Résistance et constitue, chez elle, dans sa maison d’Athis-Mons, des dépôts de tracts qu’elle distribue dans les usines.

En même temps, elle amène plusieurs de ses collègues à la lutte active et use de ses fonctions publiques pour couvrir les agissements clandestins de ses subordonnés. Elle donne également asile à des réfugiés poursuivis. À partir de 1942, en plus de ses fonctions professionnelles, elle est placée à la tête du Service central et du Secrétariat de la Direction du Travail. Elle reçoit systématiquement une notation administrative très élevée et fait en outre l’objet d’appréciations élogieuses de la part de ses chefs qui la considèrent comme un élément précieux possédant une culture étendue et faisant preuve de qualités d’organisation et d’initiative.

En septembre 1943, elle est incorporée aux Forces françaises combattantes, au titre du BCRA (Bureau central de renseignements et d’action), les services secrets de la France Combattante. Elle travaille alors, comme agent de liaison, au circuit d’évasion VIC que dirige Henri Levin. Ce réseau prend en charge les officiers français et alliés. Agent P.1 à partir du 1er novembre 1943, elle assure l’hébergement des évadés lors de leur passage à Paris et travaille sous les ordres du commandant Jacques Mitterrand, alias « Julien ».

La Gestapo l’arrête le 4 juillet 1944 à son domicile parisien du boulevard Saint-Michel, croyant y trouver « Julien », vraisemblablement à la suite des aveux d’un membre du réseau. Durant de cruels interrogatoires, elle parvient à ne pas parler sinon pour décharger plusieurs de ses collaboratrices, également arrêtées.

Internée à Fresnes, Marcelle Henry est condamnée à mort au moment ou elle est promue sous-lieutenant des Forces françaises combattantes (agent P. 2) et ne doit son salut qu’au désarroi allemand du mois d’août 1944, son dossier étant probablement égaré. L’approche des Alliés fait qu’elle est déportée le 15 août 1944 par le dernier convoi de 2 200 résistants et aviateurs alliés quittant Paris.

Arrivée le 21 août 1944 au camp de concentration de Ravensbrück elle est envoyée à Torgau, kommando de Buchenwald, où les détenus travaillent pour une usine de fabrication de munitions et d’explosifs. Il semble qu’elle refuse de travailler pour l’industrie allemande ce qui lui vaut de subir des privations supplémentaires.

En janvier 1945, le kommando est évacué sur Ravensbrück où Marcelle Henry est libérée par la Croix-Rouge le 9 avril 1945. Rapatriée en France le 14 avril par l’intervention de la Croix-Rouge, elle décède le 24 avril 1945 à Paris, à l’hôpital Claude Bernard des suites des privations et des mauvais traitements. Elle est inhumée au cimetière parisien à Bagneux (Hauts-de-Seine). Proposée en 1943 pour une inscription au tableau de sous-directeur ou de directeur adjoint, son arrestation en juillet 1944 a empêché cette promotion. Ce n’est qu’à titre posthume que, par arrêté du 10 janvier 1946, Marcelle Henry est nommée sous-directeur honoraire au ministère du Travail et de la Sécurité sociale, récompensant des titres résistants éminents mais aussi une carrière d’exception.

Distinctions :

• Chevalier de la Légion d’Honneur

• Compagnon de la Libération – décret du 27 avril 1945

• Croix de Guerre 39/45 avec palme

• Officier du Mérite Social à titre posthume


PHILIPPE LECLERC DE HAUTECLOCQUE

Philippe de Hauteclocque est né le 22 novembre 1902 au Château de Belloy Saint Léonard dans la Somme dans une famille de vieille noblesse picarde. Il entre à Saint-Cyr en 1922 (promotion Metz et Strasbourg) et en sort à la cinquième place en 1924 ; il suit brillamment ensuite les cours de l’École d’application de Cavalerie de Saumur. En 1925, il est affecté au 5e Régiment de cuirassiers en occupation en Allemagne ; après avoir passé un an à Trèves, le lieutenant de Hauteclocque obtient une affectation au 8e Spahis algériens au Maroc où il va passer cinq années. Il participe à la pacification du territoire au cours de laquelle il se distingue et prend le commandement du 38e Goum en 1929 puis sert comme officier d’état-major. Il est rappelé en métropole en 1931 et devient instructeur à Saint-Cyr. Après un bref second séjour au Maroc à l’été 1933, il est en stage à Saumur puis, promu capitaine, de nouveau instructeur à Saint Cyr. En 1938, il est reçu major à l’École de Guerre et le reste l’année suivante lorsque la guerre interrompt la formation. Fin mai 1940, faisant alors partie de l’État-major de la 4e Division d’Infanterie, il est fait prisonnier ; il parvient cependant à s’échapper et à rejoindre les lignes françaises.

Le 15 juin, lors d’une contre-attaque face à des blindés ennemis dans la plaine de Champagne, il est blessé à la tête et à nouveau capturé. Il s’évade le 17 et, via l’Espagne et le Portugal, réussit à gagner Londres où il se présente le 25 juillet au général de Gaulle sous le pseudonyme de Leclerc. Il est promu chef d’escadron.

Le 6 août 1940, envoyé en AEF, avec Claude Hettier de Boislambert et René Pleven, par le général de Gaulle, il quitte l’Angleterre pour le Cameroun. Il a pour mission de ramener le territoire dans la guerre et, le 27 août 1940, à Douala où il a débarqué la veille en pirogue avec 22 hommes, il reçoit le ralliement du territoire à la France libre et en est nommé ensuite Commissaire général ; en novembre 1940, il rallie le territoire du Gabon à la France libre puis, promu lieutenant-colonel, est désigné comme commandant militaire du Tchad.

De Fort-Lamy (Tchad), il lance avec la Colonne Leclerc, dès le 25 janvier 1941, à travers 650 kilomètres de désert, une opération contre le fort italien de Koufra qu’il conquiert le 1er mars. Le lendemain, il proclame : « Jurons de ne déposer les armes que lorsque nos couleurs, nos belles couleurs, flotteront sur la Cathédrale de Strasbourg », c’est le Serment de Koufra. Le 6 mars 1941, il est nommé Compagnon de la Libération par le général de Gaulle.

Promu colonel en juin 1941 puis général de brigade en août, il mène alors contre les Italiens une campagne de harcèlement et lance du 2 février au 14 mars 1942, une expédition victorieuse sur le sud du Fezzan. Un butin important est pris ou détruit. Alors que Rommel avance sur l’Égypte, différentes patrouilles sont organisées au nord et à l’est du Tibesti. Les conditions de vie sont extrêmes, en plus de la chaleur, s’ajoutent les distances qui se chiffrent en milliers de kilomètres, le tout s’opérant loin de toute base logistique.

À la mi-décembre 1942, Leclerc entreprend la conquête du Fezzan avec plus de 3 000 hommes formant la « Force L ». L’attaque est fulgurante et très en profondeur, allant jusqu’à Tripoli. Le succès est total. Le 24 janvier 1943, la jonction est opérée avec les troupes britanniques. La « Force L » s’installe alors en Tunisie pour protéger le flanc de la VIIIème Armée britannique, entre dans Kairouan le 12 avril et défile le 8 mai 1943 dans Tunis libéré, ce qui vaut à Leclerc d’être présenté par Montgomery au roi George VI.

Le 15 mai 1943, la Force L devient la 2e Division française libre (2e DFL).

Trois mois plus tard naît la 2e Division blindée qui prend forme au Maroc, à Temara où elle est organisée, entraînée et équipée de matériel américain. En avril 1944, elle est transférée en Angleterre où elle attend impatiemment l’heure du débarquement en France. Leclerc passe sous le commandement du général Patton et débarque en Normandie, près de Saint-Martin-de-Varreville le 1er août 1944. Leclerc dirige ses troupes pendant les difficiles combats de Normandie : Alençon, la Forêt d’Ecouves, Ecouché, Carrouges, Argentan.

Le 18 août, l’ennemi est partout en déroute. Mais Leclerc ne parvient pas à obtenir l’ordre de marcher sur Paris. Ce n’est que le 22 août que, l’autorisation lui ayant enfin été accordée, il fait mettre la 2e DB en mouvement. Le 25 août 1944, il entre dans la capitale par la Porte d’Orléans debout dans son scout-car, reçoit la reddition du général Von Choltitz et installe son P.C. dans la gare Montparnasse.

Dès le début de septembre, il reprend sa route vers l’Est et après avoir forcé les Vosges, fait hisser le drapeau français à Croix de Lorraine sur la flèche de la Cathédrale de Strasbourg, le 23 novembre 1944. Il nettoie l’Alsace et la Lorraine, participe à la réduction de la poche de Colmar et, fin avril 1945, ayant atteint la Bavière, reçoit comme objectif le nid d’aigle d’Hitler à Berchtesgaden.
Aussitôt après la capitulation allemande, Philipe Leclerc est désigné pour commander le corps expéditionnaire français en Extrême-Orient. Le 22 juin 1945, la 2e DB est rassemblée dans la Forêt de Fontainebleau pour recevoir l’adieu de son chef. Leclerc quitte la France le 18 août 1945 et signe, le 2 septembre, pour la France, l’acte de la capitulation du Japon. Il parvient à Saigon le 5 octobre 1945 ; il pacifie en trois mois le Cambodge et la Cochinchine et débarque en mars 1946 au Tonkin : le 15 juin, ses troupes sont à la frontière chinoise.

En juillet 1946, il est promu général d’armée et devient inspecteur général des Forces terrestres d’Afrique du Nord.
Le 12 avril 1947, il est nommé inspecteur des Forces terrestres, maritimes et aériennes de l’Afrique du Nord puis membre du conseil supérieur de la Défense.

Au cours d’une mission, le 28 novembre 1947, son avion s’écrase près de Colomb-Béchar en Algérie. Il est inhumé dans la crypte des Invalides.

Par décret du 23 août 1952, le titre suprême de Maréchal de France lui est conféré à titre posthume.

Distinctions : 

• Grand Croix de la Légion d’Honneur 

• Compagnon de la Libération – décret du 6 mars 1941 

• Médaille Militaire 

• Croix de Guerre 39/45 (8 citations)

• Croix de Guerre des TOE avec deux palmes 

• Médaille de la Résistance avec rosette 

• Médaille des Evadés 

• Médaille Coloniale avec agrafes « Maroc », « Fezzan », « Koufra », « Tripolitaine », « Tunisie », « E-O » • Médaille des Blessés 

• Médaille des Services Volontaires dans la France Libre 

• Médaille Commémorative de la Guerre 39/45 

• Commandeur de l’Ordre du Bain (GB) 

• Distinguished Service Order (GB) 

• Silver Star (USA) • Bronze Star Medal (USA) 

• Commandeur de la Legion of Merit (USA) 

• Presidential Unit Citation (USA) 

• Grand Officier de l’Ordre de la Couronne Royale (Belgique) 

• Croix de Guerre 40/45 avec palme (Belgique) 

• Croix de Guerre 39-45 (Luxembourg) 

• Grand Croix de l’Ordre de la Couronne de Chêne (Luxembourg) 

• Ordre du Virtuti Militari (Pologne) 

• Croix de Guerre 39/45 (Tchécoslovaque) 

• Ordre du Lion Blanc (Tchécoslovaque) 

• Croix de Guerre de 1ère Classe (Grèce) 

• Ordre de la Paz au Maroc (Espagne) 

• Grand Croix de l’Ordre du Nicham Iftikar (Tunisie) 

• Grand Croix de l’Ordre du Ouissam Alaouite (Maroc) 

• Grand Croix de l’Ordre Royal du Cambodge 

• Grand Croix de l’Ordre du Parasol Blanc (Laos) 

• Grand Croix de l’Ordre du Million d’Eléphant (Laos)


JEAN MOULIN 

Jean Moulin est né le 20 juin 1899 à Béziers où son père était professeur d’histoire et conseiller général radical-socialiste de l’Hérault. Bachelier en 1917, il s’inscrit à la faculté de droit de Montpellier et entre parallèlement comme attaché au cabinet du préfet de l’Hérault. Jean Moulin est mobilisé en avril 1918 et envoyé dans les Vosges où le surprend l’armistice de novembre 1918. Licencié en droit, il entre très tôt dans la carrière préfectorale : d’abord secrétaire général de Préfecture à Montpellier, il est en 1925 le plus jeune sous-préfet de France, à Albertville en Savoie. Il est successivement sous-préfet de Châteaulin (19301933), de Thonon (1933) puis secrétaire général de la Somme (1934-1936).Il a également appartenu à plusieurs cabinets ministériels et notamment celui de Pierre Cot, Ministre de l’Air dans le gouvernement du Front populaire d’où il s’engage dans l’aide clandestine à l’Espagne républicaine. Nommé préfet en mars 1937, il est, là encore, le plus jeune préfet de France et est nommé à Rodez en 1938 puis à Chartres l’année suivante.

Lorsque la guerre éclate, il veut rejoindre les troupes, mais il est maintenu en affectation spéciale à Chartres où il fait face à l’exode de la population. Le 17 juin 1940, il reçoit alors les premières unités allemandes ; les autorités d’occupation veulent lui faire signer une déclaration accusant des unités de tirailleurs africains d’avoir commis des atrocités envers des civils à
LA LIBÉRATION DE PARIS FICHE ENSEIGNANT.E
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Saint-Georges-sur-Eure, en réalité victimes des bombardements allemands. Maltraité et enfermé parce qu’il refuse de signer, il se tranche la gorge. Soigné in extremis par les Allemands, il reste à son poste avant d’être, comme préfet de gauche, révoqué par Vichy début novembre ; il part pour la zone sud, s’installe dans la maison familiale de SaintAndiol (Bouches-du-Rhône) et prend contact avec les principaux mouvements de résistance de zone sud.

En septembre 1941, il quitte la France par ses propres moyens pour rejoindre l’Angleterre depuis le Portugal après avoir traversé l’Espagne. À Londres, il est reçu par le général de Gaulle auquel il fait le compte-rendu de l’état de la résistance en France et de ses besoins. Rapidement convaincu de l’intelligence et des capacités de son interlocuteur, le chef des Français libres renvoie Moulin en métropole avec pour mission de rallier et d’unir les mouvements de résistance. Il doit également créer une Armée secrète en séparant le militaire du politique.

Avec des moyens financiers et de transmission, Jean Moulin est parachuté sur les Alpilles le 2 janvier 1942 à 3h30 du matin. Il installe son Q.G. à Lyon. Délégué général du général de Gaulle, « Rex », alias Moulin, commence à mener à bien sa tâche complexe et délicate en zone sud. Il rencontre Henri Frenay, Emmanuel d’Astier et Jean-Pierre Levy, respectivement responsables des trois principaux mouvements de la zone sud Combat, Libération et Franc-Tireur, leur apporte une aide financière, parvient, non sans mal, à aplanir leurs différends. Son action aboutit, en octobre 1942 à la création de l’Armée secrète (AS), fusion des groupes paramilitaires de ces trois grands mouvements, dont le commandement est confié au général Delestraint puis, au début de l’année 1943, à la création des Mouvements unis de Résistance (MUR) rassemblant Combat, Libération et Franc-Tireur. Grand amateur d’art et dessinateur lui-même, l’ancien préfet Jean Moulin ouvre entre-temps une galerie d’art à Nice, la galerie Romanin (son propre pseudonyme d’artiste), qui lui sert de couverture. En février 1943, Jean Moulin se rend à nouveau à Londres où il rend compte de sa mission et est décoré par le général de Gaulle de la Croix de la Libération. De retour en France le 20 mars par une opération Lysander, « Rex » devenu « Max » est le seul représentant du général de Gaulle pour la Résistance. Ses efforts dans toutes les directions, malgré certaines réticences, aboutissent bientôt à la constitution du Conseil national de la Résistance (CNR) dont la première réunion se tient sous sa présidence au 48 de la rue du Four à Paris, le 27 mai 1943. Il s’agit d’un conseil réunissant les responsables de mouvements de résistance des deux zones mais aussi des responsables politiques et syndicaux. Important politiquement car il symbolise aux yeux du monde – et surtout des Alliés – l’unité française, le CNR adopte lors de sa première réunion une motion reconnaissant le général de Gaulle comme le seul chef politique de la France combattante.

Dans le but d’organiser rapidement la relève à la tête de l’Armée secrète qui vient d’être décapitée par l’arrestation à Paris du général Delestraint, Moulin en convoque les responsables pour le 21 juin 1943 à Caluire, dans la banlieue de Lyon, chez le Docteur Dugoujon. Mais à la suite de dénonciations, la police de sécurité allemande (SIPO-SD) menée par Klaus Barbie intervient : tous sont arrêtés et emmenés à la prison du Fort Montluc.

Interrogé par Barbie qui l’identifie après deux ou trois jours, Jean Moulin ne dit rien. Il est transféré début juillet avenue Foch à Paris puis dans une villa de Neuilly, où la Gestapo avait coutume « d’interroger » des personnalités importantes ; sans que l’on sâche réellement si c’est à cause des tortures subies ou parce qu’il a tenté de se suicider, son état de santé est désespéré. C’est vraisemblablement pour tenter de le soigner et de le conserver comme otage qu’il est transféré en Allemagne. C’est dans le train, quelque part entre Metz et Francfort, alors qu’il n’a déjà plus figure humaine, qu’il meurt le 8 juillet 1943.

Ses cendres, jusqu’alors déposées au Père Lachaise, ont été transférées au Panthéon le 19 décembre 1964.

Distinctions : 

• Chevalier de la Légion d’Honneur 

• Compagnon de la Libération – décret du 17 octobre 1942 

• Médaille Militaire • Croix de Guerre 1939-45 

• Chevalier du Mérite Agricole 

• Médaille Commémorative de la Grande Guerre 

• Médaille de l’Éducation Physique avec rosette 

• Médaille d’Honneur (argent) des Assurances sociales (Ministère du Travail) 

• Médaille de la Prévoyance Sociale 

• Médaille d’Honneur (argent) de l’Assistance publique (Ministère de la Santé Publique)

• Chevalier de la Couronne d’Italie (1926) 

• Commandeur de la Couronne de Yougoslavie 

• Ordre de Jade (Chine, 1938)


HENRI ROL-TANGUY (Alias : Louis – Théo – Morel – Prat – Gay – Imbert – Nordal – Rol)

Henri Tanguy est né le 12 juin 1908 à Morlaix dans le Finistère d’un père officier marinier et d’une mère blanchisseuse. Il fait ses études primaires à Toulon, Brest et Cherbourg. Ouvrier métallurgiste dans la région parisienne dès l’âge de 14 ans, en 1922, il fait son service militaire en 1929 au 8e Régiment de Zouaves à Oran. Militant communiste, il devient, en octobre 1936, secrétaire du Syndicat des Travailleurs de la Métallurgie CGT de la région parisienne.

Il sert en Espagne de février à octobre 1937 dans les rangs des Brigades internationales de l’Armée républicaine espagnole. Il est officier et occupe le poste de Commissaire Politique dans la 14e Brigade (« La Marseillaise »). En février 1938, il retourne en Espagne où il fait l’apprentissage du feu. Le 18 juin 1938, il est blessé d’une balle dans la poitrine sur le front de l’Ebre. De retour en France en novembre 1938, il est mobilisé en septembre 1939 et affecté comme soldat de 1ère classe au 57e Régiment d’Infanterie coloniale (57e RIC) en Lorraine. En mai 1940, il est affecté comme armurier au 28e Régiment d’Infanterie coloniale mixte sénégalais ; promu lieutenant, il prend part aux combats de la 28e Division du 5 au 24 juin 1940 et est cité à l’ordre du Régiment.

Démobilisé en août 1940, il refuse la défaite et par antifascisme et patriotisme, il rejoint immédiatement les rangs de la Résistance parisienne avec son épouse Cécile et ses camarades du syndicat des Métaux. Il prend la tête des comités populaires de la région parisienne qui doivent remplacer clandestinement les syndicats désormais contrôlés par le gouvernement de Vichy. Dès le début du mois d’octobre 1940 à la suite d’une vague d’arrestations et alors qu’il est recherché par la police de Vichy, Henri Tanguy, avec son épouse, entre dans la clandestinité prenant alors différents pseudonymes.

Dans les mois qui suivent, il participe également à la mise sur pied de l’Organisation spéciale (OS), mouvement communiste chargé de l’action directe et du sabotage, et exerce des responsabilités au sein du PCF parisien.

Dès juillet 1941 il met en place, peu à peu, avec Raymond Losserand et Gaston Carré une direction militaire de la résistance dans la région parisienne, créant de petits groupes armés.

Début 1942, Henri Tanguy est nommé chef des Francs-Tireurs et Partisans (FTP) de la région parisienne. Peu de temps après, en mai 1942, Raymond Losserand et Gaston Carré sont arrêtés – et quelques mois plus tard fusillés – alors que Henri Tanguy échappe de peu à l’arrestation à son domicile. C’est pourquoi, pour des raisons de sécurité, il est nommé en septembre 1942, par le comité national FTP, chef des FTP de la région « Poitou-Anjou » puis de la région Atlantique. En mai 1943, à la suite d’une nouvelle vague d’arrestations à Paris, il est de nouveau nommé chef des FTP de la région parisienne avec pour mission de réorganiser le mouvement. Il rédige également avec sa femme un journal clandestin, le FrancTireur Parisien.
En septembre 1943, il est nommé représentant des FTP au Comité d’Action contre la Déportation (CAD) que dirige Yves Farge et qui a pour but d’empêcher le départ en Allemagne des requis du Service du Travail obligatoire (STO), notamment par la fabrication de faux-papiers. Il participe au titre des FTP, dans le dernier trimestre de l’année 1943, à la mise en place de l’Étatmajor des Forces françaises de l’Intérieur (FFI) de la région parisienne (Région P1) qui comprend onze départements. Il prend donc part à la création des FFI et est nommé en janvier 1944, chef du 3e Bureau (Opérations), sous-chef d’État-major. Le 1er juin 1944, il devient chef régional des FFI pour les quatre départements de la région Ile-de-France (Seine, Seine-etMarne, Seine-et-Oise, Oise) en remplacement de Périco (Pierre Pène), arrêté. Il est en même temps promu lieutenant-colonel et prend à cette occasion le nom de Rol, en hommage à un officier des Brigades internationales, Théo Rol, tué en 1938. Il se consacre alors entièrement à la préparation de la libération de la capitale en liaison étroite avec le Comité d’Action militaire (COMAC) du Conseil national de la Résistance (CNR), le Délégué militaire national Jacques Chaban-Delmas et les membres du Comité parisien de la Libération (CPL).

L’avance des Alliés en Normandie donne bientôt le signal de l’insurrection. Le 8 août, les FTP et le COMAC se mettent à la disposition de Rol. Du 10 au 15 août, des grèves éclatent dans les administrations parisiennes (cheminots, gendarmes, policiers) et le 15 août, le colonel Rol lance un appel aux forces de l’ordre pour qu’elles se rangent aux côtés des FFI.

Le 18 août au matin commencent la grève générale et les premières occupations d’usines. Le même jour, le colonel Rol envoie une première mission chargée d’établir une liaison avec les Américains (commandant de Varreux) et parallèlement, dans la soirée, décrète la mobilisation générale des Parisiens ; une affiche est apposée sur les murs, donnant aux Parisiens l’ordre de rejoindre les FFI. Dès le lendemain, la Préfecture de Police est occupée par des policiers insurgés auxquels Rol rend visite pour les soutenir.

Le 20 août, l’État-major FFI est installé dans son poste de commandement souterrain de la place Denfert-Rochereau, sous le Lion de Belfort. Le même jour, l’Hôtel de Ville est pris et les escarmouches entre forces françaises et allemandes se multiplient en banlieue et dans plusieurs arrondissements, qui sont conquis par les insurgés. Le 21 août en début de soirée, le colonel Rol fait afficher l’ordre de dresser les barricades et renouvelle son appel le lendemain. 600 barricades couvrent rapidement la capitale. Rol fait même appel au secrétaire du syndicat des terrassiers.

Le colonel Rol réalise dans les journées du 20 au 24 août, avec 100 000 hommes placés sous ses ordres, une manoeuvre générale libérant les neuf dixièmes de la capitale, aboutissant à l’isolement puis à l’investissement de l’ennemi dans quelques points d’appui qui sont réduits le 25 août en étroite collaboration avec la 2e DB du général Leclerc ; le colonel Rol assiste à la Préfecture de Police à la signature de l’acte de reddition sans condition des forces allemandes du général Von Choltitz et contresigne lui-même un des exemplaires.

Il est ensuite affecté à la 1ère Armée française du général de Lattre de Tassigny et rejoint après le passage du Rhin, le 151e Régiment d’Infanterie au sein de la 2e Division d’Infanterie marocaine (2e DIM). Dès lors, il participe, à partir du 1er avril 1945, comme adjoint au commandant, à tous les combats du Régiment, du Rhin au Danube. Le 13 avril, il tombe, au cours d’une reconnaissance pour laquelle il s’était porté volontaire, sur un détachement ennemi ; il se jette résolument sur lui, aidé seulement par un lieutenant et un sous-officier, le met en fuite et fait trois prisonniers. Le sous-officier ayant été tué au cours de l’action, il ramène son corps, parcourant plusieurs kilomètres en pleine Forêt Noire, pour rejoindre le PC, sous la menace des infiltrations allemandes.

Après la capitulation de l’Allemagne, le 18 juin 1945, il est décoré de la Croix de la Libération par le général de Gaulle, Place de la Concorde à Paris avant d’être nommé, en juin 1945, adjoint au commandant de l’Infanterie Divisionnaire de la 2e DIM. En décembre 1945, il est intégré dans l’Armée d’active avec le grade de chef de bataillon et bientôt nommé chef de corps du 27e Régiment d’Infanterie, puis de la 7e Demi-Brigade à Dijon. En avril 1947, il est affecté au cabinet militaire du Ministre de la Défense nationale. De 1948 à 1951, il est chef du 3e Bureau à l’État-major de la subdivision du Mans. Il part à la retraite en 1962.

Membre du Comité central du PCF (1962-1987), Henri Rol-Tanguy est également Président de l’Association Nationale des Anciens Combattants de la Résistance (ANACR) et Président de l’Amicale des Anciens Volontaires Français en Espagne Républicaine.

Henri Rol-Tanguy est décédé le 8 septembre 2002 à Paris. Il est inhumé au cimetière de Monteaux dans le Loir-et-Cher.

Distinctions :

• Grand Croix de la Légion d’Honneur

• Compagnon de la Libération – décret du 18 janvier 1946

• Croix de Guerre 39/45 (3 citations)

• Médaille de la Résistance • Croix du Combattant Volontaire

• Croix du Combattant Volontaire de la Résistance

• Medal of Freedom (USA)

• Médaille de l’Amitié des Peuples (URSS)

Fiche N°5

À partir du Débarquement du 6 juin 1944, les Alliés prennent le dessus petit à petit sur les troupes allemandes en Normandie. Mais la situation n’est pas simple pour la résistance intérieure qui tente d’apporter un soutien aux armées alliées. Celles-ci avancent avec difficulté dans le bocage normand se trouvant confrontées à une résistance importante de la Wehrmacht tout au long du mois de juillet. 

Le 1er juin 1944, Henry Tanguy « Rol » est placé à la tête des Forces françaises de l’Intérieur (FFI) d‘Île-de France. Le 14 juillet 1944, de nombreuses manifestations en banlieue et dans les quartiers populaires ont lieu ; des mouvements de grève sont également lancés et s’intensifient à partir du 10 août. 

« Dans la matinée du 19 août, les membres du Conseil national de la Résistance (CNR) et ceux du Comité parisien de Libération (CPL) se réunissent séparément dans les locaux du ministère de l’Éducation nationale situés rue de Bellechasse. Après débats et discussions séparés, vers 11 heures du matin, les deux organismes décident conjointement de lancer chacun un “appel à l’insurrection” qui est placardé dans Paris. Depuis le 10 août, les cheminots, puis les policiers le 15, sont entrés en grève. Impatience, fébrilité ou concurrence des diverses composantes de la Résistance, précipitation ou série de contretemps, difficultés des liaisons, certainement tout cela mêlé, des groupes ont déjà devancé cet appel, prenant possession de diverses mairies parisiennes dès le 18 août. Il en est de même pour la première occupation symbolique de “l’insurrection”, avant l’arrivée des troupes alliées encore loin de Paris, la Préfecture de Police, située sur l’île de la Cité. Au matin du 19 août, 2 000 policiers insurgés occupent la Préfecture de Police. Bussière, le Préfet de police est arrêté. Rol-Tanguy se rend sur les lieux pour soutenir les insurgés et leur prescrire le port du brassard FFI. Les policiers accueillent Charles Luizet et hissent les couleurs. » Cécile Vast, DVD-ROM La Résistance en Île-de-France, AERI, 2004. 

Du 19 au 24 août est menée une difficile insurrection. Des groupes armés mènent des attaques contre des soldats ou des véhicules allemands, selon les opportunités, ce qui donne lieu à des ripostes de tirs allemands. Toutes les organisations de la Résistance appellent à la mobilisation. Le poste de commandement de l’Étatmajor du FFI est installé sous la place Denfert-Rochereau. Des barricades apparaissent dans les rues de Paris, de violents engagements ont lieu. Certains sont vite meurtriers. Une trêve est adoptée le 20 août 1944 mais elle n’est pas respectée (une partie des FFI la considérait comme une trahison) et les combats reprennent deux jours plus tard. Des places emblématiques sont conquises telles que la Préfecture de Police, l’Hôtel de Ville, plusieurs mairies dont celle du 17ème. Mais le problème du nombre et de l’armement des FFI reste central, du moins jusqu’à l’arrivée de la 2e Division blindée (2e DB) du général Leclerc. Sur ordre en date du 22 août, les premiers éléments de la 2e DB entrent dans Paris en renfort dès le 24 août. 

Le 25 août, la 2e DB tout entière entre dans Paris, accompagnée par la 4e Division d’infanterie américaine. De très violents engagements ont lieu, notamment à l’École militaire, boulevard Saint-Michel, à l’Étoile, etc. La ville est libérée ; une convention de reddition est rédigée entre Leclerc et Dietrich von Choltitz (commandant militaire du Grand Paris au moment de la Libération). 

De Gaulle arrive à Paris ce jour-là et se rend au poste de commandement du général Leclerc à Montparnasse pour prendre connaissance de l’acte de capitulation. Il se rend ensuite à l’Hôtel de Ville et prononce son célèbre discours sur Paris « libéré par lui-même ». Le 26 août, il descend les Champs-Élysées devant une foule immense, prend une voiture à la Concorde, passe par l’Hôtel de Ville, puis va à Notre-Dame. Des tirs de source mal connue ont lieu après son passage, rue de Rivoli, devant l’Hôtel de Ville et à Notre-Dame. Dans la nuit du 26 au 27, un bombardement allemand frappe Paris. Des combats ont lieu en région parisienne, du côté du Bourget.

La libération de Paris n’entraîne alors pas sa destruction mais elle aboutit à la mort de « 901 membres des Forces françaises de l’Intérieur (FFI) et 582 civils ainsi que 3 200 Allemands et plus de 2 000 blessés » (Alya Aglan, La France défaite (1940-1945), La Documentation photographique, novembre-décembre 2017, p. 60).

Pour aller plus loin :

– La carte interactive de la région parisienne par le Musée de la Résistance en ligne :

http://www.museedelaresistanceenligne.org/baselieu/.

– Dossier thématique de France télévision sur la libération de Paris accompagné d’une frise interactive composée de vidéos :

https://www.tiki-toki.com/timeline/entry/316380/La-libration-de-Paris-jour-aprs-jour/.

– Récit de la libération de Paris sur le site du musée de l’ordre de la Libération : https://www.ordredelaliberation. fr/fr/compagnons/les-communes/paris.

– François Marcot, « Comment écrire l’histoire de la Résistance ? », Le Débat, 2013 / 5, n°177, p. 182.

Cette séance vise à prendre connaissance des événements qui ont conduit à la libération de Paris. L’activité se construit grâce à un relevé d’informations dans une vidéo, des photographies et une restitution.

Fiche N°6

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, des événements commémoratifs de la Libération ont été mis en place, dans un premier temps pour célébrer l’action des résistant.e.s, puis dans un second temps pour conserver le souvenir de cette période de l’Histoire.
Les commémorations

Pour les 70 ans, la Mairie de Paris avait mis au point une fresque audiovisuelle projetée sur les murs de l’Hôtel de Ville le soir du 25 août (https://www.dailymotion.com/video/k12dA524k8qt7P8HJCe?start=3) et a créé un site dédié à cet événement (http://liberationparis70.paris.fr/fr/). Ces opérations venaient clore un cycle commémoratif marqué notamment par l’exposition « Paris 1940-1944. Le quotidien des Parisiens sous l’Occupation », présentée au couvent des Cordeliers en décembre 2010 (http://quotidien-parisiens-sousoccupation.paris.fr/dossier_exposition-aux-cordeliers).

Pour commémorer les 75 ans de la libération de Paris, la municipalité inaugurera le 25 août 2019, place DenfertRochereau, le nouveau « musée de la Libération de Paris – musée du général Leclerc – musée Jean Moulin » qui s’installera alors dans ses nouveaux locaux sis dans l’un des pavillons Ledoux de la place (http://www. museesleclercmoulin.paris.fr/). Installé à l’origine dans des locaux situés au-dessus de la gare Montparnasse, le musée avait été inauguré en 1994, pour le cinquantenaire, symbolisant la mémoire de la Résistance intérieure et de la France libre comme le rappelle la présentation du musée (http://www.museesleclercmoulin. paris.fr/fr/le-musee-dugeneral-leclerc-et-de-la-liberation-de-paris-musee-xxccjean-moulin) :

« Le musée met en parallèle l’action et le parcours de ces deux hommes, le général Leclerc, figure emblématique des Forces française libres, et Jean Moulin, symbole de la Résistance intérieure. Ces deux monographies se dessinent sur la toile de l’Histoire de la France pendant la Seconde Guerre mondiale, la Résistance de juin 1940 à la Libération en 1944, le Paris allemand, le Paris résistant, le gouvernement de Vichy et les occupants. Ces deux espaces dédiés se rejoignent symboliquement dans une salle dédiée à la Libération de Paris, qui est l’aboutissement de l’action de ces hommes dont les combats respectifs ont concouru au même but. »

Le nouveau musée s’installera à proximité du Poste de commandement des FFI parisiens dirigés par le colonel Rol-Tanguy, preuve de la charge mémorielle du lieu choisi.

Les objets mémoriels

Désormais, les objets mémoriels nous rappelant cette histoire sont présents dans notre quotidien. Ces objets prennent différentes formes, de la plus simple à la plus monumentale : un timbre, une affiche, un uniforme, une plaque commémorative ou encore un monument aux morts. Les traces laissées dans la ville et les lieux emblématiques de cette histoire permettent de garder en mémoire ces événements et d’honorer les hommes et les femmes ainsi que les groupes de résistance ayant œuvré à la Libération. Le musée de la résistance en ligne propose une carte interactive qui recense les plaques commémoratives, les stèles, les monuments ainsi que de nombreux documents d’archives liés à l’histoire de la Résistance et de la Libération. Cette carte interactive constitue un formidable outil mémoriel pour travailler sur cette période de l’Histoire : http://www.museedelaresistanceenligne.org/baselieu/. Voici une présentation de cet outil :

« Au hasard des rues, nous trouvons à Paris et en Île-de-France de nombreuses plaques commémoratives. Celles qui concernent l’histoire de notre région pendant la Seconde Guerre mondiale sont nombreuses (plus de 1 000 dans Paris intra-muros) et très variées. Les plaques commémoratives, en hommage aux victimes des combats de la Libération sont apparues tout de suite après la Libération, dès le 25 août 1944. Elles se veulent un signe tangible pour lutter contre l’oubli. Elles pérennisent l’instant et l’endroit du souvenir, elles le sacralisent avec cette phrase presque toujours présente : “Ici est tombé…”. Ces plaques commémoratives sont la rencontre inédite dans la rue d’un passé intime et de notre histoire commune. Elles viennent nous rappeler un événement historique important, et en même temps elles sont pour certains un lieu de recueillement sacré car l’être aimé est tombé sous le feu de l’ennemi dans cette rue, devant cet immeuble… Si on prend le temps de les observer de près et de les comparer, on est étonné de constater qu’elles offrent chacune un aspect personnel et singulier. Elles sont toutes différentes dans leur format, le caractère des lettres, la décoration, la couleur, le texte… »

« Aujourd’hui, la plupart des habitants de Paris ont oublié que les rues dans lesquelles ils marchent chaque jour ont été le théâtre de violents affrontements au moment de la Libération. Pour certains, ces discrètes stèles restent un symbole important du combat pour la liberté. Ces plaques sont notre histoire à tous, l’histoire de notre ville, de notre pays, elles sont visibles par tous, Parisiens ou touristes. Elles composent notre mémoire collective. » Philippe Castetbon dans DVD-ROM, La Résistance en Île-de-France, AERI, 2004.

Quant au mémorial, c’est un monument qui rappelle plutôt la mémoire des hommes et des femmes, disparus dans des conditions violentes, dans des guerres notamment. De même, le monument aux morts est une sculpture ou un ouvrage d’architecture érigé en hommage aux soldats morts ou disparus par faits de guerre. Le monument aux morts est construit par les collectivités territoriales, le plus souvent les communes. Il peut prendre différentes formes : statue, stèle, plaque, obélisque, etc.

Plusieurs mémoriaux ont été élevés à Paris pour célébrer la mémoire de ceux et celles qui ont lutté contre l’occupant, qui ont œuvré à la Libération ou encore des victimes des persécutions nazies : le mémorial de la porte d’Orléans en hommage au général Leclerc, le mémorial des Martyrs de la Déportation sur l’île de la Cité, le mémorial aux Combattants du 9e arrondissement, le mémorial de la Shoah, etc.

Pour aller plus loin :

– Parcours muséographique du Musée de la Libération de Paris – musée du général Leclerc- musée Jean Moulin : http://www.museesleclercmoulin.paris.fr/fr/le-musee-du-general-leclerc-et-de-la-liberation-deparis-musee-jean-moulin#paragraphe3.
– Article de la revue « L’École des lettres » sur les 70 ans de la libération de Paris et la « mise en mémoire »
immédiate de la Libération avec une exposition dès novembre 1944. Cet article insiste sur la notion intéressante de « mise en abyme » pour expliquer l’emboîtement des mémoires au travers de ces deux expositions : http://actualites.ecoledeslettres.fr/sciences-humaines/histoire-sciences-humaines/liberationde-paris-la-memoire-longue/.
– Présentation de l’exposition du musée Carnavalet de 2014 : http://www.carnavalet.paris.fr/fr/expositions/ paris-libere-paris-photographie-paris-expose. Et une présentation vidéo de la commissaire de l’exposition de 2014 qui explique le projet de 1944 et les partis-pris par rapport à celle-ci, notamment le fait de proposer des objets aux côtés des photographies : https://www.youtube.com/watch?v=88D7oXvz3is.

Cette séance vise à prendre connaissance des objets mémoriels liés à la libération de Paris. L’activité se met en place à partir d’un relevé d’informations dans des documents écrits et visuels et d’une restitution.

Fiche N°7

Cette séance se présente sous la forme du jeu des « Que/Qui suis-je ? » et s’appuie sur des éléments en lien avec la Libération de Paris. Elle est l’occasion de faire un bilan des connaissances acquises par les élèves de façon ludique.

Exemples de « Qui suis-je ? »

Énigme n°1

– Je suis nommé chef des Forces françaises de l’Intérieur de la région Île-de-France en juin 1944.

– Mon poste de commandement secret est caché dans des souterrains parisiens.

– Le 21 août 1944, j’appelle tous les Parisien.e.s à construire des barricades. Qui suis-je ? Le colonel Rol-Tanguy

Énigme n°2

– Je deviens le chef des Français libres pendant la Seconde Guerre mondiale.

– J’ai dû insister auprès du général Eisenhower pour que ses troupes participent à libération de Paris.

– Le 25 août 1944, je prononce un discours historique à l’Hôtel de Ville de Paris. Qui suis-je ? Le général De Gaulle

Énigme n°3

– Je deviens le chef du parti nazi en 1921.

– Je porte le titre de Führer.

– Mon armée occupe Paris à partir de juin 1940. Qui suis-je ? Adolf Hitler

Exemple de « Que suis-je ? »

Énigme n°4

– Je rappelle le souvenir d’une personne ou d’un événement.

– Je prends la forme d’un petit écriteau.

– On m’accroche sur un mur ou un monument par exemple. Que suis-je ? Une plaque commémorative

Énigme n°5

– Ma forme est celle d’une figure géométrique et je suis de petite taille.

– J’apparais à partir de 1940.

– Les Français m’utilisaient pour pouvoir se nourrir, s’habiller et se chauffer. Que suis-je ? Une carte de rationnement.

Énigme n°6

– On me fabrique avec tout ce que l’on peut trouver dans la rue.

– Les Parisiens me construisaient pour bloquer les forces allemandes.

– Je suis l’un des symboles de l’insurrection.

Que suis-je ? Une barricade

Cette activité se construit autour d’un relevé d’informations dans divers documents, puis d’un réinvestissement des acquis sous forme du jeu « Que/Qui suis-je ? »

Cette activité peut être divisée en deux séances : jouer à répondre à des « Que suis-je ? » et « Qui suis-je ? » (étapes 1 et 2), puis créer des énigmes en binôme (étapes 3 à 5).